De sang froid
Difficulté **
Profondeur ****
Originalité ****
Emotions ****
Le Zola des sixties ? La volonté implacable de décrire tous les aspects du meurtre de quatre membres d’une même famille fait de cette œuvre un retour sans concession au naturalisme. 8 millions d'exemplaires vendus viennent en reconnaître la réussite.
La qualité de l’écriture et de la traduction, jointe à un talent redoutable pour livrer chaque pièce du puzzle au moment juste, maintiennent l’intérêt du lecteur pour une histoire qui flirte parfois avec le morbide.
L’observation se veut en effet exhaustive : l’histoire et la psychologie des victimes, des assassins, des policiers, des amis, des familles, des compagnons de cellule… sont décrites avec finesse et imagination. Le point de vue narratif se déplace ainsi à plusieurs reprises : parfois externe, parfois interne (le shérif, le tueur …), pour fournir des variations nécessaires à des perceptions distinctes du même événement.
La rigueur naturaliste contraint enfin son auteur à inclure les commentaires les plus vils et les plus stupides au sein de son histoire, dans une concession douloureuse à la bêtise du genre humain.
Les sujets sociétaux (peine de mort, vengeance, enfance difficile) sont exposés sans complaisance et sans jugement, à une époque plus dure que la nôtre. La dernière partie de l’oeuvre analyse la psyché des tueurs sans mobile, avec une réflexion sur leur enfance et leurs affects, pour la première étude littéraire de la figure aujourd’hui classique du psychopathe.
La sensibilité de l’auteur le place parmi les grands. Rarement la comédie humaine n’aura autant mérité son nom dans cette affaire atroce et absurde qu’un écrivain génial a sublimé par sa compréhension et son affection pour le genre humain.